Le dilemme(?) stratégique des fournisseurs alternatifs d’énergie

L’ouverture des marchés de l’énergie à la concurrence ont fait émerger de nouveaux fournisseurs d’énergie. Ils ne sont pas producteurs. Ils ne sont pas gestionnaires d’infrastructure de distribution. Leur modèle semble inédit à l’échelle d’un territoire national. J’entends souvent de grands énergéticiens les dédaigner, ne retrouvant pas chez ces alternatifs, le savoir-faire technique qui a fait leur gloire passée.

Sont-ils vraiment à dédaigner ? N’ont-ils pas un pouvoir de nuisance pour les fournisseurs historiques ? Et ne sont-ils pas en train d’imprimer un changement durable aux marchés de l’énergie ?

En ce qui concerne l’électricité, les temps leur sont favorables en Europe : il est moins coûteux d’acheter de l’électricité que de la produire. Les prix de gros sont bas, durablement bas. Mais pour s’imposer comme un fournisseur de référence, deux grandes stratégies sont possibles :

  • Une stratégie de coût. Son impact est limité par une part de l’énergie excédant rarement la moitié du prix payé par le consommateur. Les redevances payées aux gestionnaires de transport et de distribution, les taxes, les différentes ponctions pour financer les énergies renouvelables sont les mêmes pour tous les fournisseurs et réduisent d’autant la part du prix sur laquelle il est possible de se différencier.

Certains grands consommateurs sont sensibles au prix et sont les premiers attirés par ces nouveaux offreurs. Néanmoins,              les coûts d’acquisition de ces clients sont élevés, les marges réduites et bâtir une activité rentable n’est pas chose facile.

Les ménages sont moins réceptifs, à moins que le fournisseur historique ait cristallisé sur lui de nombreux ressentiment par un service défaillant depuis longtemps. Là encore, les marges sont faibles et la rentabilité sensible aux moindres aléas.

Dans tous les cas, le volume vendu et la part de marché sont des éléments de réussite déterminants pour ces fournisseurs alternatifs qui n’hésitent pas à redoubler d’efforts pour gagner du terrain, quitte à pénaliser leurs marges un peu davantage.

  • Une stratégie de différenciation, par les services notamment. Les services énergétiques demandent une compétence technique et commerciale longue à développer. Les offres demandent des efforts soutenus pour s’établir sur le marché. Ces alternatifs ont rarement la solidité nécessaire pour suivre cette voie. Ceux qui, néanmoins, cherchent à se différencier, restent timides, limités par leurs moyens.

Les alternatifs misent par contre sur le service client, la qualité du support et de la relation, initialement peu développé chez les fournisseurs historiques. Ils montrent une extraordinaire inventivité et d’un dynamisme important pour investiguer de nouveaux accès au client, ils importent d’autres secteurs des méthodes commerciales qui ont fait leurs preuves. Mais comment attirer encore plus vite de nouveaux clients qui n’ont pas encore testé ce service ? Quelques labels indépendants permettent de faire connaître à un auditoire élargi les performances services remarquables mais la croissance générée reste souvent lente.

Dans tous les cas, le dilemme stratégique des fournisseurs d’énergie alternatifs, et encore davantage pour l’électricité que pour le gaz, est de trouver le bon dosage entre croissance et coût d’acquisition des parts de marché. Au delà de ce dilemme, la menace pesant sur les fournisseurs historiques est bien réelle et la protection dont bénéficient leurs marges à travers les tarifs règlementés pourrait bien être de courte durée.

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