Des projets numériques posent quelquefois question aux citoyens : les compteurs intelligents par exemple. D’autres en posent plus rarement : la quasi-généralisation de l’accès internet haut-débit. Quelle caractéristique les différencie pour que l’accueil qui leur est réservé soit si différent alors que les risques objectifs associés sont très proches?
Dans quelle catégorie peut-on prévoir les Smart Cities, projets complexes, difficilement compréhensibles par les citoyens ? Projets contestés ou projets acceptés ?
Pour répondre à la première question, sans avoir fait d’études approfondies sur le sujet, je me suis rendu compte clairement à propos des projets faisant l’objet des plus vives critiques que les citoyens n’en percevaient pas le sens pour eux, soit qu’il ait été mal explicité, soit qu’il soit carrément absent du projet.
Reconnaissons que le sens, pour le citoyen, d’un compteurs intelligent n’est pas simple à expliquer : économiser l’énergie pourraient être un sens acceptable mais faire le lien entre compteur intelligent et économies d’énergie n’est pas évident. Pouvoir suivre sa consommation ne la fait pas baisser ! Le sens ne peut pas être imposé au citoyen, il doit s’imposer à lui.
Le sens que prend un déploiement de compteurs intelligents pour le gestionnaire de réseaux, quant à lui, s’impose aisément car les productivités induites sont faciles à comprendre.
Par expérience, une nouvelle fois, je serais tenté d’extrapoler cette observation à tous les projets Smart, numériques. Dans une ville régulièrement congestionnée, le déploiement d’un système de « Smart Traffic » se matérialisant pour les automobilistes par une synchronisation des feux tricolores sur les grands axes adaptée aux conditions de trafic, ou par un système d’information et de guidage vers des itinéraires moins chargés, a un sens évident.
Une application de Smart Parking permettant de repérer plus facilement les places libres fait gagner un temps précieux, toujours bienvenu.
En raisonnant application par application, la notion de sens côtoie étroitement celle de bénéfice, de valeur.
Par analogie, une démarche Smart City ne saurait être initiée sans que le sens de la démarche ne soit clarifié. Concevoir une démarche Smart City comme un simple recours à la technologie, comme une initiative limitée dans le temps ou encore comme une collection d’initiatives numériques sans cohérence transverse, a de grandes chances de conduire à l’échec.
Le sens d’une démarche Smart City conduit inévitablement à se questionner sur l’évolution du mode de vie, de l’espace de vie de chacun, des infrastructures (transport, santé) et des services associés, nécessaires à la gestion d’une population urbaine toujours plus importante. Cette recherche de sens remet le citoyen au centre de toutes les préoccupations.
Le sens sera un appui très important pour gérer le paradoxe d’une Smart City : le développement du numérique comprend aussi bien l’apparition de e-services très impliquant pour le citoyen et le déploiement de solutions M2M, d’automatisation de certains systèmes, en particulier dans le domaine énergétique, réduisant l’impact possible du citoyen.
Une démarche Smart City donne donc une occasion unique de corriger le manque d’appropriation de la ville et de ses structures par les citoyens. Si, techniquement, la première étape est de faire émerger ce sens si important pour la suite, puis de rentrer dans une phase de vision, de planification, de structuration, d’architecture du projet, il est indispensable d’inclure une représentation des citoyens dès le début.
Cette représentation atteindra son objectif si elle n’est ressentie ni comme l’effet d’une mode ni comme un passage obligé dans une logique électoraliste, mais bien comme une volonté désormais profondément ancrée de la gouvernance urbaine.
L’acceptation à terme des démarches Smart City passe par des changements et des étapes dont il ne faut pas sous-estimer l’importance.
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