Deux mondes énergétiques semblent se côtoyer aujourd’hui : celui lié aux sources d’énergie centralisées, certains diront l’ancien monde et celui lié aux sources d’énergie décentralisées, les mêmes personnes diront le nouveau monde ou le monde de la nouvelle énergie.
L’existence de ces deux mondes est-elle immuable ? Représentent-ils à eux seuls une période révolue et une autre qui s’annonce.
Tout d’abord, le monde lié aux sources d’énergie centralisées n’est pas celui des énergies fossiles : les grandes installations hydroélectriques comme les grandes fermes éoliennes offshore en font partie. Il est également très probable que le développement de l’hydrogène vienne partiellement alimenter ce monde-là. A ce titre, le traiter d’ancien monde me semble abusif.
L’appellation est d’autant plus abusive qu’il ne disparaîtra pas en quelques années : les centrales à charbon, unités les plus polluantes, font l’objet d’une attention particulière et nous espérons les voir disparaître rapidement. Mais il ne pourra en être de même des centrales à gaz et des centrales nucléaires qui représentent une part importante des capacités mondiales de génération d’électricité.
Enfin, nous pouvons questionner la pertinence d’une vision sans sources d’énergie centralisées. J’y reviendrai plus tard.
Le monde de la nouvelle énergie n’est pas que celui du solaire photovoltaïque, comme on se plait à le rappeler quelquefois. Beaucoup d’autres énergies ou vecteurs d’énergie sont locaux : la récupération de chaleur fatale, la géothermie, le biogaz, les réseaux de chaleur.
Ce monde s’enrichit de nouvelles applications comme la mobilité électrique, sous toutes ses formes. Il conduira probablement à une structuration des systèmes énergétiques différente de leur forme actuelle, probablement des mailles locales faisant l’objet d’un premier niveau de gestion et d’équilibre.
Mais de telles mailles locales sont-elles réalistes si elles doivent intégrer des centres de consommation majeures tels certaines industries ou des grands data centers. Qui assurera, à bas coût, la continuité de service au sein de ces mailles ? et comment ? Nous avons probablement dans les réponses à ces questions de bonnes raisons de penser que les deux mondes que j’ai décrits ont tout intérêt à coexister et à se compléter.
Il est intéressant d’observer les mouvements des grands énergéticiens actuels.
Certains, à l’image d’EDF, semblent encore concentrer davantage d’efforts sur le monde centralisé, en gardant toutefois un œil sur le monde de la nouvelle énergie.
D’autres, comme E.ON ou ENEL se focalisent de plus en plus sur le monde de la nouvelle énergie, allant jusqu’à désinvestir des capacités de production hydrauliques, peu émettrices de CO2. La stratégie de ces énergéticiens semble laisser entendre qu’il est difficile de réussir sur les deux tableaux, de développer en parallèle des modèles différents et que le monde de la nouvelle énergie, plus proche des consommateurs et des usages sera davantage source de valeur.
Pourtant une troisième catégorie d’acteurs semble vouloir poursuivre les deux pistes et se développer sur les deux mondes, Fortum et Engie par exemple.
Il sera probablement plus difficile pour les villes et les collectivités territoriales de traiter avec un interlocuteur exclusivement centré sur le monde centralisé. Ces derniers devenant des acteurs de plus en plus importants et influents dans la gouvernance des systèmes énergétiques, je donnerai volontiers un petit avantage aux énergéticiens se développant sur le monde de la nouvelle énergie.
Mais si beaucoup d’acteurs tendent à opposer ces deux mondes, je me demande si les grands gagnants de demain ne seront pas les énergéticiens qui auront su bâtir une grande complémentarité entre eux.
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