European Utility Week : Entre énergéticiens et technologies, le fossé se creuse-t-il ?

European Utility Week, le principal événement réservé aux utilities, s’est fait l’écho au début du mois, d’une invasion et d’un bouillonnement technologique sans précédent.

Mais comment le monde des énergéticiens peut-il faire face à un tel mouvement ? A-t-il les compétences pour cela ? Est-il en phase avec cette évolution ?

Je vois plusieurs conséquences de cette suractivité technologique pour les énergéticiens.

Les énergéticiens, au sein d’un modèle intégré réunissant production, distribution et vente, dans un contexte monopolistique ont été régi par la technique. Ils offraient à leurs clients ce qui était permis par les systèmes énergétiques. Très rarement, pendant des années, les systèmes énergétiques n’ont été modifiés pour améliorer le service aux clients.

Aujourd’hui encore, la technique domine les débats et les services marketing ont à développer leur compréhension de leurs clients, de leurs habitudes, de leurs besoins. L’émergence de tant de nouvelles technologies va nécessairement à l’encontre de cet enjeu. Ce paradoxe est la première conséquence.

Ne confondons par autant, même si elles comportent des points communs, technique et technologies. La technique codifie les pratiques d’un métier : c’est exactement ce qu’on fait les énergéticiens, pendant des années, concernant les métiers de la production et de la distribution, imposant cette codification à leurs clients.

La technologie a une dimension plus théorique et la notion de technologies aujourd’hui est souvent couplée à une idée de nouveauté. Dans l’industrie, la technique est au centre de la R&D, les technologies supposent des démarches plus anticipatrices, préalables.

Aucun énergéticien n’a dans son ADN les fondements du management technologique : la compréhension des tendances, des écosystèmes autour des technologies, les processus d’étude et d’intégration de ces technologies. Ils doivent donc apprendre à sélectionner des technologies, à tisser et nourrir les partenariats adaptés, à les intégrer en plusieurs étapes à leurs systèmes et à leurs solutions. Cette obligation est la deuxième conséquence.

Certains énergéticiens se démarquent pourtant de ce cadre général : EDF, fort d’un département R&D très compétent, a pu développer un management technologique intéressant mais qui semble avoir creusé le fossé entre les directions opérationnelles et la R&D. ENEL est en train de se doter de structures de management technologique inspiré d’industries numériques.

Forts de ces constats, il me semble indispensable pour la plupart des énergéticiens :

  • De s’immerger dans les technologies pour en comprendre les fondements et les évolutions.
  • D’établir les liens entre les technologies, les systèmes énergétiques eux-mêmes (c’est à dire leur métier) et les besoins des clients. Le choix des partenaires pour une solution Smart Home montre très souvent combien les énergéticiens ne pensent pas le lien entre technologie et clients : pérennité, évolutivité, coût, exploitation des solutions sont rarement au centre des préoccupations.
  • Dépasser le concept de démonstrateur qui contribue partiellement seulement au management technologique.
  • De repenser leur rapport aux start-ups, simples pourvoyeurs de solutions aujourd’hui, élément possiblement durable d’un écosystème technologique demain.

A Utility Week, les énergéticiens étaient, cette année, étonnamment peu nombreux. Ne ressentent-ils pas le besoin d’immersion dans les écosystèmes naissants ? Sont-ils submergés par les ruptures en cours ? Quelles que soient les raisons de cette « absence », la question de l’intimité des énergéticiens avec les technologies est vraiment au centre des enjeux actuels.

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