La libéralisation des marchés énergétiques c’est à dire leur ouverture à la concurrence a été très largement commentée sur le plan des résultats (court terme) obtenus. La concurrence a-t-elle favorisé la baisse des prix pour les consommateurs ?
Mais la libéralisation a été beaucoup moins souvent observée sous l’angle des jeux d’acteurs et des dynamiques des écosystèmes nationaux, c’est à dire sous l’angle de ce que pourraient être des effets long terme.
Dans les pays où le marché historique de la fourniture est concentré sur un acteur dominant, comme, par exemple, la Belgique (Electrabel), l’Irlande (ESB), le Portugal (EDP) ou encore la France (EDF, Engie ex GDF), le mot d’ordre est, dès l’ouverture du marché, « à l’abordage!, tous contre le leader historique ».
La démarche des nouveaux fournisseurs consiste, dans un premier temps, à repérer les faiblesses du leader et à l’attaquer sur ces faiblesses : parmi ces faiblesses, on retrouve souvent le niveau de prix ou la réactivité, deux conséquences fréquentes d’une situation de monopole durable. L’ouverture de ce type de marché crée, pendant les premières années, peu de diversité ; la situation évolue quand certains challengers atteignent une taille leur permettant d’investir dans un positionnement plus élaboré.
Deux cas se présentent, selon le succès de la stratégie défensive immanquablement suivie par l’opérateur historique et selon la notoriété et le succès d’estime dont il bénéficie :
- Soit le taux de départ de ses clients est vite important (c’est presque toujours le cas des grands comptes, quelquefois le cas des clients particuliers) et le leader historique n’a pas d’autre choix que de se réinventer dans la douleur et, dans le meilleur des cas, il lui faut au moins cinq ans pour enrayer la fuite de ses clients.
- Soit le taux de départ est faible et légitime sa stratégie défensive et, dans ce cas, il ne se passe rien de significatif sur le marché tant que la situation perdure.
Dans les pays où le marché historique de la fourniture est fragmenté, avec des acteurs historiques régionaux, voire très locaux, comme par exemple, l’Autriche, l’Allemagne, la Suisse et dans une moindre mesure la Grande Bretagne, le mot d’ordre est « Faisons la différence ! ».
Chaque fournisseur devient un nouveau fournisseur potentiel dans les territoires voisins de son périmètre historique. Il est donc possiblement attaqué de toutes parts mais ne peut se contenter d’une cible unique.
Cette configuration de marché donne plus de diversité car il faut se différencier au milieu de plusieurs approches différentes. Les fournisseurs d’énergie sont donc contraints de progressivement définir plus clairement leur proposition de valeur, leur spécificité et être plus inventifs.
Par contre, on observe plus rapidement des difficultés pour certains fournisseurs, contraints de s’adosser voire se faire racheter par des concurrents, ou de cesser leur activité de fournisseur pour se concentrer sur les activités restant dans le domaine régulé.
On commence à observer des différences de dynamiques importantes entre énergéticiens de pays voisins mais ayant des structures de marché plus ou moins favorables au changement : attention à ce que les marchés qui semblent encore protégés aujourd’hui ne deviennent pas des cibles prioritaires à l’avenir.
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