La principale, que dis-je ?, l’unique activité des énergéticiens vis à vis de leurs clients résidentiels a été, pendant des décennies, de leur fournir et de leur vendre, du gaz et de l’électricité, en quantité en apparence illimitée et avec un minimum de coupures.
Depuis quelques années déjà, des évolutions viennent perturber cette situation :
- L’ouverture des marchés introduit une concurrence qui n’autorise plus une fourniture « passive » de l’énergie, au sens où rien n’obligeait à faire évoluer une fourniture aux caractéristiques en apparence satisfaisantes.
- Les ménages peuvent devenir producteur d’électricité dont l’énergéticien n’est plus le seul pourvoyeur.
- Les ménages micro-producteurs et consommateurs proches peuvent désormais des regrouper au sein de communautés partageant ces micro-productions.
- Seuls, les flux de consommation donnaient lieu à transaction : l’énergéticien vendait au consommateur. Désormais la production assurée par un consommateur résidentiel de même qu’une non-consommation est valorisée.
- L’essor des véhicules électriques combiné à l’efficacité énergétique des logements change la hiérarchie des applications consommatrices d’énergie : la thermique (chauffage, air conditionné) reste importante mais est en passe de se faire détrôner par la mobilité électrique dont les besoins sont très spécifiques.
- De nombreuses solutions émergent pour une meilleure efficacité énergétique : réseaux de chaleur, stockage et optimisation locale de l’énergie, piles à combustibles, pompes à chaleur etc… Elles ont pour effet de localiser une partie des « systèmes » énergétiques chez les consommateurs résidentiels.
- Grâce aux courants porteurs, au PoE et d’autres technologies encore, une convergence devient possible entre fluides hier encore bien distincts : électricité et données.
Comment les énergéticiens doivent-ils, peuvent-ils se positionner par rapport à ces évolutions ? Ils possédaient l’ensemble de la chaîne production, distribution : une partie leur échappe désormais. Ils maîtrisaient et géraient l’ensemble des flux énergétiques et des transactions associées : une partie leur échappe désormais.
Trois axes de réflexion permettent de répondre aux questions qui se posent :
- Dans tous les cas, les énergéticiens ont besoin de se différencier : les fournisseurs, pour développer ou protéger leurs parts de marché, les producteurs pour rendre leur production plus attractive, les gestionnaires de réseaux pour apparaître des vecteurs de transition et de performance énergétique. Aucun ne peut désormais se contenter de prolonger son activité passée au risque de mourir, économiquement ou politiquement.
- Les énergéticiens peuvent choisir de conserver un positionnement traditionnel en apportant une valeur supérieure : pour un fournisseur, cela signifie continuer à vendre du gaz ou de l’électricité mais, soit moins cher, soit avec un impact environnemental réduit, soit encore en soignant sa relation client. Cette différenciation est rapidement perçue par un consommateur et vite mise en œuvre : elle permet donc des résultats rapides. Mais elle semble ignorer bon nombre des évolutions listées ci-dessus.
- Les énergéticiens peuvent ne plus vendre de l’énergie mais de l’intelligence énergétique. Cette intelligence peut se décliner sur 4 critères :
- La dimension multi-fluides : vu du client, la performance de l’offre énergétique en termes de coût, de sécurité, de services, de résilience passe par une alimentation multi-fluides et, potentiellement, une optimisation locale. Les fournisseurs mono-fluides ne peuvent accéder à un tel niveau de réponse.
- La délégation d’exploitation : les consommateurs résidentiels peuvent, veulent acquérir un degré d’autonomie énergétique sans en percevoir les risques et sans avoir une idée précise des compétences et savoir-faire nécessaires. L’énergéticien peut offrir plusieurs niveaux de prise en charge de l’exploitation et de l’entretien des installations localisées chez le client : le contrat d’entretien de la chaudière gaz est la version préhistorique de cet axe.
- Le service : souvent limité à la relation client, à son information et à des activités simples comme la facturation, le service peut, dans le contexte décrit plus haut, prendre des formes plus complexes : guider, conseiller, orienter le client dans ses choix a une valeur très forte. L’énergéticien a une expertise à partager avec ses clients, souvent ignorants des choses de l’énergie : encore faut-il apprendre à la partager sans intention commerciale directe ! Les retombées commerciales doivent provenir de la confiance et de la fidélisation établies et non pas directement des conseils fournis.
- La verticalisation des activités : l’énergéticien, hier vendeur de fluides, peut aujourd’hui être fournisseur d’équipements, installateur, agent de maintenance et d’exploitation, conseiller, concepteur etc …chaque niveau d’intégration ayant bien sûr ses avantages et ses inconvénients.
Plusieurs énergéticiens tentent déjà de fournir de l’intelligence énergétique. Ils balbutient mais la cohérence de leur offre progresse de jour en jour. L’alternative « énergéticien low cost » reste, sous certaines conditions, crédible mais le développement de l’intelligence énergétique offerte est la clé de la différenciation future. Sur ce terrain, beaucoup d’énergéticiens reste bien timides voire absents.
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